Pour traiter le réel et ses faits bruts, nous créons des espaces intermédiaires psychiques de représentation et d’interprétation, — des storyworlds — , et nous formons la réalité.
La réalité a ainsi toujours une dimension imaginaire, elle relève de la fiction, elle est fictionnelle.
Mais si tout est storyworld, si tout est récit — donc, d’une certaine manière, si tout est « fiction » —, tout n’est pas pour autant « fictif ». Le fictionnel n’est pas le fictif.
Le fictionnel est notre rapport au monde, notre façon de le connaître, de le rendre compatible avec ces êtres symbolisants que nous sommes. Le fictif est l’invention d’un monde qui n’est pas le miroir du monde réel. Le fictionnel peut donc être réaliste ou fictif.
Il est réaliste quand il cherche sincèrement à rester cohérent avec les faits bruts et accepte de se réviser pour maintenir cette fidélité au réel.
Il est fictif dans deux cas :
- Quand il se pose d’emblée comme relevant de la sphère de la représentation, de la mimesis, et qu’il n’a aucune prétention à forger le réel, à être performatif (l’art, le jeu, le sport).
- Quand il veut se faire passer pour réaliste alors qu’il ne l’est pas, qu’il ne tient pas compte des faits bruts du réel mais veut se substituer au réel.